[n° ou bulletin]
Titre : |
2020/2 - 2020/2 - Le travail social entre pouvoir discrétionnaire et pouvoir d’agir |
Type de document : |
texte imprimé |
Auteurs : |
Cyprien Avenel , Auteur ; Nicolas Duvoux , Editeur scientifique |
Année de publication : |
2020 |
Importance : |
314 p. |
Note générale : |
Le travail social connaît actuellement un retour inédit à l’agenda politique qui tend à
lui redonner une légitimité après une longue période de doute sur sa pertinence et son identité.
D’abord, pour la première fois de son histoire, le travail social français vient de recevoir une
définition officielle (mai 2017) en intégrant le code de l’action sociale et des familles.
Ensuite, des « États généraux du travail social » ont donné lieu à la mise en œuvre d’un « Plan
d’Action interministériel en faveur du Travail Social et du Développement Social » (2015).
Enfin, la « Stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté » annoncée en septembre
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2018 conforte la volonté de franchir une étape dans la mutation du travail social (refonte des
diplômes supérieurs, participation des personnes accompagnées, lutte contre le non recours,
simplification des démarches administratives, promotion de l’intervention collective, premier
accueil social inconditionnel de proximité, référent de parcours, développement social…).
Pourtant, ce contexte institutionnel favorable coïncide avec un diagnostic de crise récurrente
du travail social.
Les frontières extensibles du travail social
Le travail social ne forme pas un champ homogène, mais plutôt un ensemble
fractionné entre une multiplicité de professions, dont la genèse, les traditions et les profils
sont fort disparates (Molina, 2015) et dont les missions apparaissent souvent incertaines, avec
des employeurs tout aussi divers, sans même parler de l’hétérogénéité des problèmes sociaux
et des "usagers" qui n’ont pas cessé de se diversifier. Le travail social s’est construit selon des
généalogies séparées (le service social, l’éducation spécialisée, l’animation), chaque lignée
ayant ses propres axes de clivage et ses traditions historiques (Autès, 1999). Il ne se limite pas
au champ de la pauvreté : il s’occupe aussi du médico-social (établissements), de la petite
enfance et de la protection de l’enfant, des personnes âgées. Les professionnel.le.s exercent
ainsi dans des institutions très diversifiées. Ils et elles peuvent être des agents de l’État et des
collectivités territoriales, mais également appartenir au monde associatif. Avec les nouveaux
métiers liés aux dispositifs de la politique de la ville et aux politiques d’insertion qui se
développent dès le début des années 1980, une nouvelle expression, celle d’« intervention
sociale », vient de surcroît brouiller les frontières (médiateurs sociaux et familiaux ;
animateurs, conseillers en insertion, agent de développement, économie sociale et solidaire,
mais aussi action bénévole) (Chopart, 2000). Les travailleurs sociaux interviennent désormais
aux côtés d’autres intervenants impliqués dans l’action sociale et la santé au sein du spectre
large des métiers de l’aide à autrui. Cependant, ces mutations, loin de n’avoir des effets que
sur les frontières du travail social, portent également sur le sens des missions, fragilisant la
dimension tutélaire du travail social (Donzelot et Roman, 1998).
Par ailleurs, dans un contexte de raréfaction des ressources budgétaires, l’intervention
publique est de plus en plus assignée à produire des résultats concrets et mesurables dans des
délais rapprochés (Ion, 2006). Les outils informatiques et les règles comptables, centrées sur
le suivi des entrées et sorties des dispositifs, participent également d’une « protocolisation »
du travail social (Janiaut, 2012). C’est finalement une nouvelle façon de gérer le monde du
travail social qui se constitue, comme en témoigne dans plusieurs pays de l’Europe la
« nouvelle gestion publique » (Bresson et al., 2013), voire la « managérialisation » du travail
social (Chauvière, 2007).
Nouveaux enjeux, nouveaux cadres d’action
La première évolution majeure pour le travail social concerne le retour de la figure du
« pauvre » comme catégorie d’action publique, en lieu et place du travailleur promu par la
Sécurité sociale. Le chômage de masse et les formes de sous-emploi ont profondément
modifié la composition des publics du travail social. Aujourd’hui, la précarité ne désigne plus
des « inadaptés sociaux », mais des travailleurs sans travail et, de manière croissante, à
mesure que les frontières du travail et de l’assistance se brouillent (Martin et Paugam, 2009),
des travailleurs pauvres ou des individus à bas salaires. Face à cette nouvelle question sociale,
la réponse a consisté à développer des dispositifs dont l’empilement conduit à une « gestion
sociale du non travail » (Castel, 1998).
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Une deuxième évolution, tout aussi considérable pour le travail social, concerne la
question de l’immigration et la prise en compte des discriminations ethno-raciales (Safi,
2013). De ce point de vue, c’est non seulement la réalité de la composition de la société
française qui a occasionné un basculement, ou une hybridation de la « question sociale » avec
la « question raciale » (Fassin et Fassin, 2006), mais également des formes d’autoreprésentation très prégnantes dans les quartiers populaires depuis le début des années 1990
(Beaud et Masclet, 2006). Le travail social se trouve dès lors réinterrogé à l’aune de
thématiques liées à la place des « différences », à la religion, à la formation de « ghettos » et
au soupçon de communautarisme qui s’exerce sur des populations minoritaires (Avenel, 2010;
Boucher et Belqasmi, 2011; Mohammed et Talpin, 2018).
Une troisième évolution est l’individualisation du traitement de la question sociale.
Cette politique de l’individu (Castel, Duvoux, 2013) a pour caractéristique de cibler ce dernier
et de le mobiliser pour l’obtention du droit, ce qui est une inflexion fondamentale de l’esprit
du droit social au cœur de la notion d’accompagnement. L’individu est invité à développer ses
capacités à se relier aux autres. On attend de lui qu’il soit un sujet de l’intervention, partie
prenante des décisions qui le concernent, un individu responsable et auteur de son propre
parcours (Guiliani, 2013; Rist et Rouxel, 2018). En ce sens, le travail social ne saurait plus ou
plus seulement être un « travail sur autrui », mais un « travail avec » (Astier, 2007) par lequel
la relation d’aide se noue en « aide à la relation » (Ravon, 2005). La contractualisation de
l’action sociale vise à ce que le bénéficiaire ne se voie plus uniquement attribuer un statut et à
lui permettre de s’inscrire dans un « parcours » de vie (Lafore, 2016). La singularisation de
l’action sociale est depuis longtemps le cadre dominant transmis dans les centres de formation
du travail social en France (Iori, 2018).
Un des effets de cette contractualisation est d’ouvrir la voie à une forte hétérogénéité
dans les modes d’appropriation dont les individus sont capables (Duvoux, 2009), ce qui
interroge les pratiques des travailleurs sociaux. Le recentrage sur la personne est porteur
d’ambigüités et d’ambivalence, entre dette sociale et dette individuelle (Astier, 2007), comme
en témoignent les débats relatifs à « l’activation » de la protection sociale (Giraud, 2016) et le
glissement récurrent vers l’activation des personnes (Barbier, 2017). La question de la relation
du travail social avec l’emploi, dans le cadre des politiques d’insertion, est ainsi ouverte.
Quelle redéfinition des pratiques et des valeurs du travail social le rapprochement avec le
marché du travail inscrit dans les politiques d’insertion occasionne-t-il ? Quelles tensions
introduit-il pour les professionnel.le.s ? À rebours, pour les publics les plus éloignés de
l’emploi, comment le cumul des fragilités dont ils souffrent est-il intégré dans la construction
de parcours d’accompagnement ? On pense notamment aux problèmes de santé psychique ou
physique auxquels sont exposées les populations les plus vulnérables. La construction de
parcours individualisés suppose une action transversale entre les secteurs sanitaires et sociaux
et une hybridation des modes d’intervention de ces deux domaines dont l’effectivité est sujette
à caution du fait de l’inertie des cultures professionnelles différenciées et des organisations
cloisonnées.
Enfin, quatrième évolution, le travail social a été concerné par différentes réformes
institutionnelles intervenues ces dernières années, avec en particulier la décentralisation et la
loi de rénovation de l’action sociale et médico-sociale de 2002. De nouvelles politiques
sociales, prônant la territorialisation, l’activation et la responsabilisation ont été mises en
place au tournant des années 1980 et 1990 dans le cadre de la décentralisation à partir d’une
remise en cause des politiques sociales traditionnelles, centralisées et sectorisées (Donzelot et
Estèbe, 1994 ; Palier, 2002). Le législateur établit un cadre institutionnel qui vise à conforter
les conditions d’une intervention ancrée sur la prévention des exclusions et l’élaboration de
projets transversaux traitant les questions sociales dans le cadre des territoires et la
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collaboration de tous les acteurs concernés, y compris les citoyens (Andreotti et al., 2013).
Mais le constat est celui d’une usure de l’action sociale en raison du morcellement des
dispositifs, empilés en silos et de la logique gestionnaire qui les accompagne et qui conduit à
une parcellisation accrue du travail social et, par là même, de l’accompagnement des
personnes (Avenel et Bourque, 2017).
Objectif du dossier
Ce dossier a vocation à rassembler les contributions scientifiques les plus récentes qui
éclairent le renouvellement des perspectives théoriques sur le travail social, mais aussi ses
mutations sociétales et institutionnelles au moment où il revient sur le devant de la scène. Il
propose d'analyser les différentes évolutions contemporaines du travail social à partir de la
question du pouvoir. En effet, cette question du pouvoir est posée par la nature même du
travail social, comme pratique destinée à « permettre l’accès des personnes à l’ensemble des
droits fondamentaux, faciliter leur inclusion sociale et exercer une pleine citoyenneté (…)
participer au développement des capacités des personnes à agir pour elles-mêmes et dans leur
environnement » (CASF, article D.142-1-1). De ce point de vue, le travail social met en
œuvre des conceptions fortement évolutives de l’autonomie, à travers des savoirs et des
dispositifs, sans pour autant être nécessairement en capacité d’infléchir les causes des
situations qu’il traite. Ce point, de plus en plus évident à mesure que la massification des
problématiques de pauvreté et de précarité s’est fait jour, a conduit à un diagnostic sur
l’impuissance contemporaine du travail social.
On retrouve là un questionnement plus fondamental et de longue portée sur les
fonctions du travail social. Celui-ci a été pensé comme un instrument du pouvoir, que ce soit à
travers la transmission de normes et d’une discipline ou bien de l’intériorisation des manières
de penser, de sentir et d’agir des classes dominantes. Cette représentation, très en vogue dans
les années 1970, s’est progressivement inversée en un diagnostic inverse où c’est
l’impuissance du travail social à apporter des réponses aux situations qu’il traite qui est
soulignée ainsi que sa soumission aux logiques marchandes étendues à la sphère sociale. En
contrepoint à ces thèses, tout aussi générales que celles auxquelles elles ont succédé, de
nombreux travaux ont souligné l’existence d’un pouvoir discrétionnaire des agents qui sont au
contact des publics. En ce sens, la mise en lumière du pouvoir du travail social commence
avec un renouvellement de l’investigation empirique sur les effets concrets qu’il produit dans
les lieux où il s’exerce, pour aborder ensuite les transformations de l’intervention sociale,
avec l’avènement de la thématique du pouvoir d’agir et enfin revenir à la question de ce que
produit le travail social dans la société. |
Langues : |
Français (fre) |
Résumé : |
La publication de ce deuxième numéro de la Revue française des affaires sociales de l’année intervient à la suite d’un temps de préparation très particulier, puisqu’il a commencé en mars 2020, c’est-à-dire, à un moment où la population française dans son ensemble était « confinée ». La réaction du pays au covid-19 sera examinée dans un numéro ultérieur de la RFAS. En attendant, toute la rédaction remercie chaleureusement les différent·e·s intervenant·e·s qui ont rendu cette parution possible, malgré de multiples contraintes : traductrice, secrétaire de rédaction, graphiste et, bien entendu, tout·e·s les auteur·e·s ainsi que les coordonnateurs du dossier.
C’est donc un dossier sur le pouvoir du travail social que nous sommes heureux de soumettre à votre lecture. Il commence par deux cadrages signés par Robert Lafore et Marcel Jaeger. Une première partie, sur les enjeux contemporains du travail social, comprend quatre articles (sur un service d’accueil de femmes victimes de violences ; le « rétablissement » et la politique du « logement d’abord » en santé mentale ; les situations de grande marginalité sociale et les actions collectives des biffins) ainsi qu’un retour d’expérience sur l’accompagnement de familles en situation de précarité alimentaire par le Samusocial. La seconde partie du dossier traite du travail social, de l’impuissance aux pouvoirs. Les quatre articles qui la composent portent sur : l’instruction des demandes adressées aux fonds départementaux d’aide aux jeunes ; la mainlevée dans les mesures d’aide éducative à domicile ; la distribution et la perception du revenu de solidarité active et, enfin, le non-recours dans les bidonvilles. Le dossier est suivi d’un article portant sur la réflexivité comme compétence parentale. |
Note de contenu : |
Axe I : Le pouvoir discrétionnaire des agents : des cadres cognitifs aux pratiques
Un premier axe d’analyse conduit à élargir le spectre des dimensions par lesquelles le
travail social produit des effets. En effet, une littérature importante s’est développée pour
rendre compte des effets produits par les professionnel.le.s de terrain, désignés comme des
« street-level bureaucrats » par Michael Lipsky (1980). Elle permet d'explorer le “pouvoir
discrétionnaire” des agents (Dubois, 1999), leur capacité concrète à influencer la mise en
œuvre des politiques sociales qu'ils appliquent en fonction de leur statut social, de leur
formation antérieure, des interactions concrètes qu’ils nouent avec leurs usagers et des cadres
institutionnels et organisations dans lesquels ils exercent. Loin d’avoir remis en cause
l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire, l’empilement des dispositifs peut renforcer celui-ci
(« More rules may create more discretion », Evans et Harris, 2004). Cette marge de
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manœuvre des agents n'est pas sans répercussions sur les usagers (Spire, 2008). La prise en
compte des caractéristiques sociales des protagonistes situés de part et d’autre du guichet
conduit à faire apparaître des formes d’appropriation différenciées des missions. Ainsi, une
prise en compte symétrique ou structurelle des deux côtés du guichet est souhaitable, même si
elle n’est en aucun cas une condition pour pouvoir entrer dans l’appel. L’étude des dimensions
matérielles du travail social, que ce soit la description des locaux dans lesquels il se déroule et
des effets de la configuration de ceux-ci sur le contenu de l’activité (Weller, 2018), mais aussi
des conditions matérielles d’existence des professionnel.le.s est encouragée.
Ce pouvoir « discrétionnaire » se décline de manière différenciée selon les « effets
combinés et non convergents du genre et de la classe » (Serre, 2011). Les cultures
professionnelles font apparaître des variations générationnelles et d’implication militante
(Duvoux, Mutuel, 2017), qui ont des effets sur les manières de mettre en œuvre les actions
et/ou de permettre l’accès au droit des populations. L’étude des différenciations sociales des
professionnel.le.s selon différentes variables est attendue. Les approches s’inscrivant dans une
perspective de genre (Bereni et al., 2008) seront particulièrement appréciées. Ces
différenciations liées aux caractéristiques de classe, de genre et de génération des
professionnel.le.s du travail social s’articulent, de manière croissante, avec une différenciation
des rôles et des formes d’interdépendance directes ou implicites entre professionnel.le.s. Le
pouvoir discrétionnaire peut aussi s’exercer de manière collective (Weill, 2015) dans des
instances de médiation, comme cela a été démontré dans le cas du droit au logement
opposable. La diffusion de la logique d’activation conduit au développement d’actions de
contrôle qui occasionnent le développement de nouvelles pratiques (Dubois et al., 2018),
d’une nouvelle temporalité de l’action (Clouet, 2018) ou de formes d’interdépendance entre
les secteurs (comme l’insertion) fortement activés et ceux qui le sont moins (comme la
polyvalence) (Lahieyte, 2018). L’étude de la relation d’assistance à partir de ses normes
temporelles et des cadres cognitifs suscités par les formes de l’action institutionnellement
contraintes (Lima, 2017) est bienvenue, d’autant plus qu’elle est entreprise à partir des
pratiques des intervenant.e.s et des formes de réflexivité qu’elles peuvent développer
(Gardella, 2017) dans le cadre de leur activité professionnelle. Les cultures professionnelles
perdurent malgré les injonctions organisationnelles et institutionnelles, ce qui contribue à
maintenir des frontières dans la mise en œuvre du travail social (Watkins-Hayes, 2009)
comme cela a pu être démontré à partir du cas américain.
Un dernier aspect important dans la réflexion sur ce pouvoir discrétionnaire est de ne
pas négliger les dimensions symboliques et morales qu’il comporte (Fassin et al., 2013).
Quelles que soient leur technicisation et bureaucratisation, les formes d’intervention sociale
sont toujours porteuses de cadres normatifs, de manière implicite ou explicite. Cette
dimension est évidemment en lien étroit avec les positions sociales, professionnelles, de
genre, des acteurs de l’État social et des relations qu’ils entretiennent avec les autres pans de
l’État, notamment les instances judiciaires et pénales. La prégnance de ces cadres
symboliques et normatifs apparaît de manière aiguë à travers la démarche comparative
(Haapajärvi, 2018 ; Clouet, 2018). Une réflexion sur leurs effets d’inclusion et d’exclusion, de
traçage de frontières symboliques (Lamont et Molnar, 2002) serait bienvenue.
Axe II : Le pouvoir d’agir du travail social et des personnes accompagnées
La notion de pouvoir se décline également dans un deuxième sens, celui
communément appelé “pouvoir d'agir” et qui renvoie concrètement à la montée en puissance
des thématiques de la participation des usagers à la conception, la mise en œuvre et
l'évaluation des actions menées. La « participation » des personnes sera traitée à partir de trois
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principaux angles : celui du genre, à l'origine des conceptualisations en termes
d'empowerment (Bacqué et Biewener, 2013); celui du non-recours, pouvant être interprété
comme un pouvoir paradoxal des usagers de refuser les prestations et les services qui leur sont
accordés (Warin, 2016) – et les métamorphoses des pratiques professionnelles du travail
social qui y sont liées avec la valorisation du travail social collectif, de « l’aller vers », du
développement social (Avenel et Bourque, 2017) et du « community organising » (Talpin,
2016).
Depuis la fin des années 1990, on observe la montée en charge d’une nouvelle façon
de penser l’accompagnement des personnes en difficulté à travers l’affirmation d’une
conception des destinataires comme acteurs des politiques sociales et médico-sociales, avec
en particulier toute une série de lois qui vont modifier les modes de gouvernance des
institutions, mais aussi le type de relation entre les travailleurs sociaux et les usagers. A
travers ces différents textes législatifs se joue une évolution de fond qui repose sur la
valorisation du droit des usagers, dans une perspective de co-construction. La diffusion de la
démarche conduit à distinguer, pour cet appel à contributions, le niveau de la participation des
personnes concernées dans les instances institutionnelles – comités d’usagers, conseil de la
vie sociale, 8ème collège du CNLE (Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté
et l’exclusion sociale), CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées),
HCTS (Haut Conseil du travail social), etc. – et le niveau de la participation des personnes
dans les accompagnements individuels et collectifs, et depuis peu dans des dispositifs de
coformation avec les travailleurs sociaux, pour déployer des démarches d’association entre les
savoirs universitaires et les savoirs pratiques (Jaeger, 2017).
Cet appel sollicite des contributions sur le rôle des travailleurs sociaux dans cette
dynamique, en lien avec la mobilisation des associations, mais aussi sur le contenu et la portée
concrète de l’implication des personnes destinataires dans les différentes étapes de la décision,
de l’élaboration à la mise en œuvre jusqu'à l’évaluation. Par ailleurs, une limite récurrente
réside dans le lien incertain entre participation et décision, c’est-à-dire le niveau d’influence
ou de pouvoir dont disposent les individus concernés pour participer à l’élaboration même de
l’action publique et infléchir le sens et la conduite des politiques sociales (Carrel, 2013).
S’agit-il d’une simple recherche de consultation et d’« effets d’adhésion » (Donzelot et al.,
2003) ou d’une intégration à une démarche de co-construction (Blondiaux, 2008) ? Cet appel
attend éventuellement une comparaison avec d’autres pays sur ces points, car le travail social
français est identifié comme un frein, en raison d’une tradition de la relation d’aide
individualisée en face à face, d’une approche médicale et de la méfiance vis-à-vis du collectif
et du travail social communautaire (Avenel, Bourque, 2017 ; Talpin, 2016 ; Gourgues et al.,
2013). Observe-t-on en France l’émergence d’un nouveau modèle d’intervention sociale basé
sur le développement du pouvoir d’agir individuel et collectif qui met en cause les pratiques
usuelles des professionnel.le.s du travail social dans une redéfinition de leurs rapports avec les
personnes accompagnées, les institutions et la société civile ? Quelles sont les dimensions
normatives d’un tel projet ? S’agit-il d’un nouvel outil de management associant les citoyens
et les personnes accompagnées à la conduite des politiques publiques visant à une plus grande
transversalité de l’intervention et une amélioration du service rendu ? Ou est-il question aussi
d’impulser des groupes de citoyens plus autonomes visant à renforcer des capacités d’agir sur
les conditions de vie en donnant notamment du pouvoir aux populations les plus fragiles ?
La question du genre et de l’intersectionnalité dans le travail social s’impose
également comme une problématique majeure de compréhension des rapports sociaux et
demeure une variable incontournable, après un long « déni » (Bessin, 2005), des pratiques
d’un secteur professionnel très majoritairement féminisé. Le champ de l’intervention sociale
apparaît ainsi comme un espace traversé de reproduction des normes du genre qui amplifie la
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division sexuée des rôles sociaux, par exemple dans les modes d’accueil des jeunes enfants
(Murcier, 2007), en matière de protection de l’enfance et de soutien à la parentalité (Cardi,
2015) ou encore dans l’offre d’accompagnement à destination des personnes âgées (Martin,
2001), des sans-abris (Marcillat, 2018 ; Loison-Leruste et Perrier, 2019), des femmes
victimes de violence (Jaspard, 2011 ; Herman, 2012). Le genre est au cœur des stratégies
d’empowerment des femmes par de nouveaux instruments comme le microcrédit, en
particulier pour contrebalancer l’emprise des systèmes patriarcaux (Sanyal, 2014) même si
cette promotion peut s’avérer ambivalente du point de vue de ses effets sociaux (Duvoux,
2016). En ce sens, cet appel mobilise la question du genre pour renouveler la réflexion sur le
travail social en faisant émerger de nouvelles interrogations dans trois directions. En premier
lieu, elle renvoie une déconstruction théorique des stéréotypes de genre qui se répercutent sur
le travail social, en interrogeant l’organisation du travail social, les établissements de
formation, les catégories de population concernées et leurs accompagnements, l’histoire du
travail social et ses méthodes d’intervention. En second lieu, on peut se demander dans quelle
mesure le genre s’impose comme une approche favorisant la transversalité de l’action
publique et des pratiques du travail social. En troisième lieu, l’intégration du genre aux
enjeux du travail social interroge plus généralement la place du care, c’est-à-dire des « tâches
de soins » et de la « relation d’aide » dans les sociétés comme une activité ayant une valeur
universelle dissociée du féminin (Molinier, 2013).
Enfin, la prise en compte du non recours aux droits sociaux conduit aussi à repenser à
la racine les conceptions fondatrices des pratiques professionnelles du travail social. Elle
renvoie à au moins deux grandes questions. La première concerne la complexité de l’action
sociale et du difficile accès aux prestations. La deuxième réside dans la défiance qui s’est peu
à peu installée entre une partie non négligeable de la population fragilisée et les services
sociaux, ce qui explique que des personnes en difficulté finissent par renoncer à faire valoir
leurs droits. Dans quelle mesure le non-recours conduit-il à appréhender les conditions de
fonctionnement des organisations et du déploiement des pratiques professionnelles des
travailleurs sociaux qui déterminent la relation d’aide et d’accompagnement ? Cet enjeu
majeur pour le travail social peut renvoyer notamment aux thématiques de « aller vers », de la
transformation de l’offre médico-sociale et de l’approche « hors les murs ».
Axe III : Pouvoir normatif versus pouvoir de transformation du travail social
Enfin, un troisième axe de l’appel à propositions sur le pouvoir du travail social porte
sur sa capacité à être un acteur d’innovation et de transformation sociale. Cet axe vise à
réintroduire, dans un contexte d’évolutions profondes du travail social, les débats traditionnels
sur ses tensions internes : contrôle social et émancipation, gestion de dispositifs et innovation
sociale, assistance et autonomie, intervention sectorielle et approche territoriale, l’individuel
et le collectif (Autès, 1999 ; Ion, 2006 ; Chauviere, 2004 ; Karsz, 2004).
Depuis le début des années 1980, de nombreux travaux ont fortement nuancé les
thèses sur les fonctions du contrôle social (Esprit, 1972 ; Donzelot, 1977 ; Verdès-Leroux,
1978). Les individus concernés disposent d’une marge d’autonomie, peuvent négocier et,
surtout, refuser l’imposition d’une identité négative (Schnapper, 1989 ; Paugam, 1991 ;
Messu, 1991). Les bénéficiaires en viennent à bousculer la définition des rôles professionnels
(Corcuff, 1996 ; Dubois, 1999). Ces approches ont eu la grande vertu de réintroduire les
capacités d’initiative des acteurs. Aujourd’hui, avec la massification des situations de
vulnérabilité et leur diversité croissante, la diffusion de nouveaux modes de management et
des « épreuves de la professionnalité » (Ravon, 2010 ; Soulet, 2016), mais aussi des formes
d’engagement des intervenants sociaux (Gaspar, 2012), ces perspectives sont à la fois
prolongées, mais aussi contrebalancées par des logiques de responsabilisation de l’ensemble
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de la chaîne des acteurs, d’activation et d’exigences de reddition de comptes croissantes pour
les professionnel.le.s comme pour les personnes accompagnées.
Que « fabrique » le travail social dans la recomposition des pratiques de l’intervention,
notamment à travers les logiques d’individualisation et de contractualisation de l’aide et de
l’insertion ? De la même manière, comment penser la diffusion de la logique des innovations
sociales véhiculée aussi bien par l’État, les collectivités locales, les associations, les
fondations et les sociétés coopératives avec toute la thématique du travail social de
« partenariat » et de « territoire » ? Faut-il y voir une instrumentalisation accrue des pratiques
professionnelles par les pouvoirs publics, voire de « subversion d’un social par
l’économique », ou à l’inverse une forme de renouvellement et de décloisonnement par
« hybridation » des pratiques et des savoirs ? Ainsi, cet appel invite à réinterroger les
« fonctions » du travail social (« pourquoi le travail social ? » (Esprit, 1972)) et son « utilité »
(« à quoi sert le travail social ? » (Esprit, 1998)) jusqu’à la thématique de sa
« désinstitutionnalisation » et de sa dilution dans la notion plus large « d’intervention
sociale ».
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9
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En ligne : |
https://www-cairn-info.proxy.scd.univ-tours.fr/revue-francaise-des-affaires-soci [...] |
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https://cs.iut.univ-tours.fr/index.php?lvl=bulletin_display&id=56574 |
[n° ou bulletin]
2020/2 - 2020/2 - Le travail social entre pouvoir discrétionnaire et pouvoir d’agir [texte imprimé] / Cyprien Avenel  , Auteur ; Nicolas Duvoux  , Editeur scientifique . - 2020 . - 314 p. Le travail social connaît actuellement un retour inédit à l’agenda politique qui tend à
lui redonner une légitimité après une longue période de doute sur sa pertinence et son identité.
D’abord, pour la première fois de son histoire, le travail social français vient de recevoir une
définition officielle (mai 2017) en intégrant le code de l’action sociale et des familles.
Ensuite, des « États généraux du travail social » ont donné lieu à la mise en œuvre d’un « Plan
d’Action interministériel en faveur du Travail Social et du Développement Social » (2015).
Enfin, la « Stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté » annoncée en septembre
2
2018 conforte la volonté de franchir une étape dans la mutation du travail social (refonte des
diplômes supérieurs, participation des personnes accompagnées, lutte contre le non recours,
simplification des démarches administratives, promotion de l’intervention collective, premier
accueil social inconditionnel de proximité, référent de parcours, développement social…).
Pourtant, ce contexte institutionnel favorable coïncide avec un diagnostic de crise récurrente
du travail social.
Les frontières extensibles du travail social
Le travail social ne forme pas un champ homogène, mais plutôt un ensemble
fractionné entre une multiplicité de professions, dont la genèse, les traditions et les profils
sont fort disparates (Molina, 2015) et dont les missions apparaissent souvent incertaines, avec
des employeurs tout aussi divers, sans même parler de l’hétérogénéité des problèmes sociaux
et des "usagers" qui n’ont pas cessé de se diversifier. Le travail social s’est construit selon des
généalogies séparées (le service social, l’éducation spécialisée, l’animation), chaque lignée
ayant ses propres axes de clivage et ses traditions historiques (Autès, 1999). Il ne se limite pas
au champ de la pauvreté : il s’occupe aussi du médico-social (établissements), de la petite
enfance et de la protection de l’enfant, des personnes âgées. Les professionnel.le.s exercent
ainsi dans des institutions très diversifiées. Ils et elles peuvent être des agents de l’État et des
collectivités territoriales, mais également appartenir au monde associatif. Avec les nouveaux
métiers liés aux dispositifs de la politique de la ville et aux politiques d’insertion qui se
développent dès le début des années 1980, une nouvelle expression, celle d’« intervention
sociale », vient de surcroît brouiller les frontières (médiateurs sociaux et familiaux ;
animateurs, conseillers en insertion, agent de développement, économie sociale et solidaire,
mais aussi action bénévole) (Chopart, 2000). Les travailleurs sociaux interviennent désormais
aux côtés d’autres intervenants impliqués dans l’action sociale et la santé au sein du spectre
large des métiers de l’aide à autrui. Cependant, ces mutations, loin de n’avoir des effets que
sur les frontières du travail social, portent également sur le sens des missions, fragilisant la
dimension tutélaire du travail social (Donzelot et Roman, 1998).
Par ailleurs, dans un contexte de raréfaction des ressources budgétaires, l’intervention
publique est de plus en plus assignée à produire des résultats concrets et mesurables dans des
délais rapprochés (Ion, 2006). Les outils informatiques et les règles comptables, centrées sur
le suivi des entrées et sorties des dispositifs, participent également d’une « protocolisation »
du travail social (Janiaut, 2012). C’est finalement une nouvelle façon de gérer le monde du
travail social qui se constitue, comme en témoigne dans plusieurs pays de l’Europe la
« nouvelle gestion publique » (Bresson et al., 2013), voire la « managérialisation » du travail
social (Chauvière, 2007).
Nouveaux enjeux, nouveaux cadres d’action
La première évolution majeure pour le travail social concerne le retour de la figure du
« pauvre » comme catégorie d’action publique, en lieu et place du travailleur promu par la
Sécurité sociale. Le chômage de masse et les formes de sous-emploi ont profondément
modifié la composition des publics du travail social. Aujourd’hui, la précarité ne désigne plus
des « inadaptés sociaux », mais des travailleurs sans travail et, de manière croissante, à
mesure que les frontières du travail et de l’assistance se brouillent (Martin et Paugam, 2009),
des travailleurs pauvres ou des individus à bas salaires. Face à cette nouvelle question sociale,
la réponse a consisté à développer des dispositifs dont l’empilement conduit à une « gestion
sociale du non travail » (Castel, 1998).
3
Une deuxième évolution, tout aussi considérable pour le travail social, concerne la
question de l’immigration et la prise en compte des discriminations ethno-raciales (Safi,
2013). De ce point de vue, c’est non seulement la réalité de la composition de la société
française qui a occasionné un basculement, ou une hybridation de la « question sociale » avec
la « question raciale » (Fassin et Fassin, 2006), mais également des formes d’autoreprésentation très prégnantes dans les quartiers populaires depuis le début des années 1990
(Beaud et Masclet, 2006). Le travail social se trouve dès lors réinterrogé à l’aune de
thématiques liées à la place des « différences », à la religion, à la formation de « ghettos » et
au soupçon de communautarisme qui s’exerce sur des populations minoritaires (Avenel, 2010;
Boucher et Belqasmi, 2011; Mohammed et Talpin, 2018).
Une troisième évolution est l’individualisation du traitement de la question sociale.
Cette politique de l’individu (Castel, Duvoux, 2013) a pour caractéristique de cibler ce dernier
et de le mobiliser pour l’obtention du droit, ce qui est une inflexion fondamentale de l’esprit
du droit social au cœur de la notion d’accompagnement. L’individu est invité à développer ses
capacités à se relier aux autres. On attend de lui qu’il soit un sujet de l’intervention, partie
prenante des décisions qui le concernent, un individu responsable et auteur de son propre
parcours (Guiliani, 2013; Rist et Rouxel, 2018). En ce sens, le travail social ne saurait plus ou
plus seulement être un « travail sur autrui », mais un « travail avec » (Astier, 2007) par lequel
la relation d’aide se noue en « aide à la relation » (Ravon, 2005). La contractualisation de
l’action sociale vise à ce que le bénéficiaire ne se voie plus uniquement attribuer un statut et à
lui permettre de s’inscrire dans un « parcours » de vie (Lafore, 2016). La singularisation de
l’action sociale est depuis longtemps le cadre dominant transmis dans les centres de formation
du travail social en France (Iori, 2018).
Un des effets de cette contractualisation est d’ouvrir la voie à une forte hétérogénéité
dans les modes d’appropriation dont les individus sont capables (Duvoux, 2009), ce qui
interroge les pratiques des travailleurs sociaux. Le recentrage sur la personne est porteur
d’ambigüités et d’ambivalence, entre dette sociale et dette individuelle (Astier, 2007), comme
en témoignent les débats relatifs à « l’activation » de la protection sociale (Giraud, 2016) et le
glissement récurrent vers l’activation des personnes (Barbier, 2017). La question de la relation
du travail social avec l’emploi, dans le cadre des politiques d’insertion, est ainsi ouverte.
Quelle redéfinition des pratiques et des valeurs du travail social le rapprochement avec le
marché du travail inscrit dans les politiques d’insertion occasionne-t-il ? Quelles tensions
introduit-il pour les professionnel.le.s ? À rebours, pour les publics les plus éloignés de
l’emploi, comment le cumul des fragilités dont ils souffrent est-il intégré dans la construction
de parcours d’accompagnement ? On pense notamment aux problèmes de santé psychique ou
physique auxquels sont exposées les populations les plus vulnérables. La construction de
parcours individualisés suppose une action transversale entre les secteurs sanitaires et sociaux
et une hybridation des modes d’intervention de ces deux domaines dont l’effectivité est sujette
à caution du fait de l’inertie des cultures professionnelles différenciées et des organisations
cloisonnées.
Enfin, quatrième évolution, le travail social a été concerné par différentes réformes
institutionnelles intervenues ces dernières années, avec en particulier la décentralisation et la
loi de rénovation de l’action sociale et médico-sociale de 2002. De nouvelles politiques
sociales, prônant la territorialisation, l’activation et la responsabilisation ont été mises en
place au tournant des années 1980 et 1990 dans le cadre de la décentralisation à partir d’une
remise en cause des politiques sociales traditionnelles, centralisées et sectorisées (Donzelot et
Estèbe, 1994 ; Palier, 2002). Le législateur établit un cadre institutionnel qui vise à conforter
les conditions d’une intervention ancrée sur la prévention des exclusions et l’élaboration de
projets transversaux traitant les questions sociales dans le cadre des territoires et la
4
collaboration de tous les acteurs concernés, y compris les citoyens (Andreotti et al., 2013).
Mais le constat est celui d’une usure de l’action sociale en raison du morcellement des
dispositifs, empilés en silos et de la logique gestionnaire qui les accompagne et qui conduit à
une parcellisation accrue du travail social et, par là même, de l’accompagnement des
personnes (Avenel et Bourque, 2017).
Objectif du dossier
Ce dossier a vocation à rassembler les contributions scientifiques les plus récentes qui
éclairent le renouvellement des perspectives théoriques sur le travail social, mais aussi ses
mutations sociétales et institutionnelles au moment où il revient sur le devant de la scène. Il
propose d'analyser les différentes évolutions contemporaines du travail social à partir de la
question du pouvoir. En effet, cette question du pouvoir est posée par la nature même du
travail social, comme pratique destinée à « permettre l’accès des personnes à l’ensemble des
droits fondamentaux, faciliter leur inclusion sociale et exercer une pleine citoyenneté (…)
participer au développement des capacités des personnes à agir pour elles-mêmes et dans leur
environnement » (CASF, article D.142-1-1). De ce point de vue, le travail social met en
œuvre des conceptions fortement évolutives de l’autonomie, à travers des savoirs et des
dispositifs, sans pour autant être nécessairement en capacité d’infléchir les causes des
situations qu’il traite. Ce point, de plus en plus évident à mesure que la massification des
problématiques de pauvreté et de précarité s’est fait jour, a conduit à un diagnostic sur
l’impuissance contemporaine du travail social.
On retrouve là un questionnement plus fondamental et de longue portée sur les
fonctions du travail social. Celui-ci a été pensé comme un instrument du pouvoir, que ce soit à
travers la transmission de normes et d’une discipline ou bien de l’intériorisation des manières
de penser, de sentir et d’agir des classes dominantes. Cette représentation, très en vogue dans
les années 1970, s’est progressivement inversée en un diagnostic inverse où c’est
l’impuissance du travail social à apporter des réponses aux situations qu’il traite qui est
soulignée ainsi que sa soumission aux logiques marchandes étendues à la sphère sociale. En
contrepoint à ces thèses, tout aussi générales que celles auxquelles elles ont succédé, de
nombreux travaux ont souligné l’existence d’un pouvoir discrétionnaire des agents qui sont au
contact des publics. En ce sens, la mise en lumière du pouvoir du travail social commence
avec un renouvellement de l’investigation empirique sur les effets concrets qu’il produit dans
les lieux où il s’exerce, pour aborder ensuite les transformations de l’intervention sociale,
avec l’avènement de la thématique du pouvoir d’agir et enfin revenir à la question de ce que
produit le travail social dans la société. Langues : Français ( fre)
Résumé : |
La publication de ce deuxième numéro de la Revue française des affaires sociales de l’année intervient à la suite d’un temps de préparation très particulier, puisqu’il a commencé en mars 2020, c’est-à-dire, à un moment où la population française dans son ensemble était « confinée ». La réaction du pays au covid-19 sera examinée dans un numéro ultérieur de la RFAS. En attendant, toute la rédaction remercie chaleureusement les différent·e·s intervenant·e·s qui ont rendu cette parution possible, malgré de multiples contraintes : traductrice, secrétaire de rédaction, graphiste et, bien entendu, tout·e·s les auteur·e·s ainsi que les coordonnateurs du dossier.
C’est donc un dossier sur le pouvoir du travail social que nous sommes heureux de soumettre à votre lecture. Il commence par deux cadrages signés par Robert Lafore et Marcel Jaeger. Une première partie, sur les enjeux contemporains du travail social, comprend quatre articles (sur un service d’accueil de femmes victimes de violences ; le « rétablissement » et la politique du « logement d’abord » en santé mentale ; les situations de grande marginalité sociale et les actions collectives des biffins) ainsi qu’un retour d’expérience sur l’accompagnement de familles en situation de précarité alimentaire par le Samusocial. La seconde partie du dossier traite du travail social, de l’impuissance aux pouvoirs. Les quatre articles qui la composent portent sur : l’instruction des demandes adressées aux fonds départementaux d’aide aux jeunes ; la mainlevée dans les mesures d’aide éducative à domicile ; la distribution et la perception du revenu de solidarité active et, enfin, le non-recours dans les bidonvilles. Le dossier est suivi d’un article portant sur la réflexivité comme compétence parentale. |
Note de contenu : |
Axe I : Le pouvoir discrétionnaire des agents : des cadres cognitifs aux pratiques
Un premier axe d’analyse conduit à élargir le spectre des dimensions par lesquelles le
travail social produit des effets. En effet, une littérature importante s’est développée pour
rendre compte des effets produits par les professionnel.le.s de terrain, désignés comme des
« street-level bureaucrats » par Michael Lipsky (1980). Elle permet d'explorer le “pouvoir
discrétionnaire” des agents (Dubois, 1999), leur capacité concrète à influencer la mise en
œuvre des politiques sociales qu'ils appliquent en fonction de leur statut social, de leur
formation antérieure, des interactions concrètes qu’ils nouent avec leurs usagers et des cadres
institutionnels et organisations dans lesquels ils exercent. Loin d’avoir remis en cause
l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire, l’empilement des dispositifs peut renforcer celui-ci
(« More rules may create more discretion », Evans et Harris, 2004). Cette marge de
5
manœuvre des agents n'est pas sans répercussions sur les usagers (Spire, 2008). La prise en
compte des caractéristiques sociales des protagonistes situés de part et d’autre du guichet
conduit à faire apparaître des formes d’appropriation différenciées des missions. Ainsi, une
prise en compte symétrique ou structurelle des deux côtés du guichet est souhaitable, même si
elle n’est en aucun cas une condition pour pouvoir entrer dans l’appel. L’étude des dimensions
matérielles du travail social, que ce soit la description des locaux dans lesquels il se déroule et
des effets de la configuration de ceux-ci sur le contenu de l’activité (Weller, 2018), mais aussi
des conditions matérielles d’existence des professionnel.le.s est encouragée.
Ce pouvoir « discrétionnaire » se décline de manière différenciée selon les « effets
combinés et non convergents du genre et de la classe » (Serre, 2011). Les cultures
professionnelles font apparaître des variations générationnelles et d’implication militante
(Duvoux, Mutuel, 2017), qui ont des effets sur les manières de mettre en œuvre les actions
et/ou de permettre l’accès au droit des populations. L’étude des différenciations sociales des
professionnel.le.s selon différentes variables est attendue. Les approches s’inscrivant dans une
perspective de genre (Bereni et al., 2008) seront particulièrement appréciées. Ces
différenciations liées aux caractéristiques de classe, de genre et de génération des
professionnel.le.s du travail social s’articulent, de manière croissante, avec une différenciation
des rôles et des formes d’interdépendance directes ou implicites entre professionnel.le.s. Le
pouvoir discrétionnaire peut aussi s’exercer de manière collective (Weill, 2015) dans des
instances de médiation, comme cela a été démontré dans le cas du droit au logement
opposable. La diffusion de la logique d’activation conduit au développement d’actions de
contrôle qui occasionnent le développement de nouvelles pratiques (Dubois et al., 2018),
d’une nouvelle temporalité de l’action (Clouet, 2018) ou de formes d’interdépendance entre
les secteurs (comme l’insertion) fortement activés et ceux qui le sont moins (comme la
polyvalence) (Lahieyte, 2018). L’étude de la relation d’assistance à partir de ses normes
temporelles et des cadres cognitifs suscités par les formes de l’action institutionnellement
contraintes (Lima, 2017) est bienvenue, d’autant plus qu’elle est entreprise à partir des
pratiques des intervenant.e.s et des formes de réflexivité qu’elles peuvent développer
(Gardella, 2017) dans le cadre de leur activité professionnelle. Les cultures professionnelles
perdurent malgré les injonctions organisationnelles et institutionnelles, ce qui contribue à
maintenir des frontières dans la mise en œuvre du travail social (Watkins-Hayes, 2009)
comme cela a pu être démontré à partir du cas américain.
Un dernier aspect important dans la réflexion sur ce pouvoir discrétionnaire est de ne
pas négliger les dimensions symboliques et morales qu’il comporte (Fassin et al., 2013).
Quelles que soient leur technicisation et bureaucratisation, les formes d’intervention sociale
sont toujours porteuses de cadres normatifs, de manière implicite ou explicite. Cette
dimension est évidemment en lien étroit avec les positions sociales, professionnelles, de
genre, des acteurs de l’État social et des relations qu’ils entretiennent avec les autres pans de
l’État, notamment les instances judiciaires et pénales. La prégnance de ces cadres
symboliques et normatifs apparaît de manière aiguë à travers la démarche comparative
(Haapajärvi, 2018 ; Clouet, 2018). Une réflexion sur leurs effets d’inclusion et d’exclusion, de
traçage de frontières symboliques (Lamont et Molnar, 2002) serait bienvenue.
Axe II : Le pouvoir d’agir du travail social et des personnes accompagnées
La notion de pouvoir se décline également dans un deuxième sens, celui
communément appelé “pouvoir d'agir” et qui renvoie concrètement à la montée en puissance
des thématiques de la participation des usagers à la conception, la mise en œuvre et
l'évaluation des actions menées. La « participation » des personnes sera traitée à partir de trois
6
principaux angles : celui du genre, à l'origine des conceptualisations en termes
d'empowerment (Bacqué et Biewener, 2013); celui du non-recours, pouvant être interprété
comme un pouvoir paradoxal des usagers de refuser les prestations et les services qui leur sont
accordés (Warin, 2016) – et les métamorphoses des pratiques professionnelles du travail
social qui y sont liées avec la valorisation du travail social collectif, de « l’aller vers », du
développement social (Avenel et Bourque, 2017) et du « community organising » (Talpin,
2016).
Depuis la fin des années 1990, on observe la montée en charge d’une nouvelle façon
de penser l’accompagnement des personnes en difficulté à travers l’affirmation d’une
conception des destinataires comme acteurs des politiques sociales et médico-sociales, avec
en particulier toute une série de lois qui vont modifier les modes de gouvernance des
institutions, mais aussi le type de relation entre les travailleurs sociaux et les usagers. A
travers ces différents textes législatifs se joue une évolution de fond qui repose sur la
valorisation du droit des usagers, dans une perspective de co-construction. La diffusion de la
démarche conduit à distinguer, pour cet appel à contributions, le niveau de la participation des
personnes concernées dans les instances institutionnelles – comités d’usagers, conseil de la
vie sociale, 8ème collège du CNLE (Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté
et l’exclusion sociale), CNCPH (Conseil national consultatif des personnes handicapées),
HCTS (Haut Conseil du travail social), etc. – et le niveau de la participation des personnes
dans les accompagnements individuels et collectifs, et depuis peu dans des dispositifs de
coformation avec les travailleurs sociaux, pour déployer des démarches d’association entre les
savoirs universitaires et les savoirs pratiques (Jaeger, 2017).
Cet appel sollicite des contributions sur le rôle des travailleurs sociaux dans cette
dynamique, en lien avec la mobilisation des associations, mais aussi sur le contenu et la portée
concrète de l’implication des personnes destinataires dans les différentes étapes de la décision,
de l’élaboration à la mise en œuvre jusqu'à l’évaluation. Par ailleurs, une limite récurrente
réside dans le lien incertain entre participation et décision, c’est-à-dire le niveau d’influence
ou de pouvoir dont disposent les individus concernés pour participer à l’élaboration même de
l’action publique et infléchir le sens et la conduite des politiques sociales (Carrel, 2013).
S’agit-il d’une simple recherche de consultation et d’« effets d’adhésion » (Donzelot et al.,
2003) ou d’une intégration à une démarche de co-construction (Blondiaux, 2008) ? Cet appel
attend éventuellement une comparaison avec d’autres pays sur ces points, car le travail social
français est identifié comme un frein, en raison d’une tradition de la relation d’aide
individualisée en face à face, d’une approche médicale et de la méfiance vis-à-vis du collectif
et du travail social communautaire (Avenel, Bourque, 2017 ; Talpin, 2016 ; Gourgues et al.,
2013). Observe-t-on en France l’émergence d’un nouveau modèle d’intervention sociale basé
sur le développement du pouvoir d’agir individuel et collectif qui met en cause les pratiques
usuelles des professionnel.le.s du travail social dans une redéfinition de leurs rapports avec les
personnes accompagnées, les institutions et la société civile ? Quelles sont les dimensions
normatives d’un tel projet ? S’agit-il d’un nouvel outil de management associant les citoyens
et les personnes accompagnées à la conduite des politiques publiques visant à une plus grande
transversalité de l’intervention et une amélioration du service rendu ? Ou est-il question aussi
d’impulser des groupes de citoyens plus autonomes visant à renforcer des capacités d’agir sur
les conditions de vie en donnant notamment du pouvoir aux populations les plus fragiles ?
La question du genre et de l’intersectionnalité dans le travail social s’impose
également comme une problématique majeure de compréhension des rapports sociaux et
demeure une variable incontournable, après un long « déni » (Bessin, 2005), des pratiques
d’un secteur professionnel très majoritairement féminisé. Le champ de l’intervention sociale
apparaît ainsi comme un espace traversé de reproduction des normes du genre qui amplifie la
7
division sexuée des rôles sociaux, par exemple dans les modes d’accueil des jeunes enfants
(Murcier, 2007), en matière de protection de l’enfance et de soutien à la parentalité (Cardi,
2015) ou encore dans l’offre d’accompagnement à destination des personnes âgées (Martin,
2001), des sans-abris (Marcillat, 2018 ; Loison-Leruste et Perrier, 2019), des femmes
victimes de violence (Jaspard, 2011 ; Herman, 2012). Le genre est au cœur des stratégies
d’empowerment des femmes par de nouveaux instruments comme le microcrédit, en
particulier pour contrebalancer l’emprise des systèmes patriarcaux (Sanyal, 2014) même si
cette promotion peut s’avérer ambivalente du point de vue de ses effets sociaux (Duvoux,
2016). En ce sens, cet appel mobilise la question du genre pour renouveler la réflexion sur le
travail social en faisant émerger de nouvelles interrogations dans trois directions. En premier
lieu, elle renvoie une déconstruction théorique des stéréotypes de genre qui se répercutent sur
le travail social, en interrogeant l’organisation du travail social, les établissements de
formation, les catégories de population concernées et leurs accompagnements, l’histoire du
travail social et ses méthodes d’intervention. En second lieu, on peut se demander dans quelle
mesure le genre s’impose comme une approche favorisant la transversalité de l’action
publique et des pratiques du travail social. En troisième lieu, l’intégration du genre aux
enjeux du travail social interroge plus généralement la place du care, c’est-à-dire des « tâches
de soins » et de la « relation d’aide » dans les sociétés comme une activité ayant une valeur
universelle dissociée du féminin (Molinier, 2013).
Enfin, la prise en compte du non recours aux droits sociaux conduit aussi à repenser à
la racine les conceptions fondatrices des pratiques professionnelles du travail social. Elle
renvoie à au moins deux grandes questions. La première concerne la complexité de l’action
sociale et du difficile accès aux prestations. La deuxième réside dans la défiance qui s’est peu
à peu installée entre une partie non négligeable de la population fragilisée et les services
sociaux, ce qui explique que des personnes en difficulté finissent par renoncer à faire valoir
leurs droits. Dans quelle mesure le non-recours conduit-il à appréhender les conditions de
fonctionnement des organisations et du déploiement des pratiques professionnelles des
travailleurs sociaux qui déterminent la relation d’aide et d’accompagnement ? Cet enjeu
majeur pour le travail social peut renvoyer notamment aux thématiques de « aller vers », de la
transformation de l’offre médico-sociale et de l’approche « hors les murs ».
Axe III : Pouvoir normatif versus pouvoir de transformation du travail social
Enfin, un troisième axe de l’appel à propositions sur le pouvoir du travail social porte
sur sa capacité à être un acteur d’innovation et de transformation sociale. Cet axe vise à
réintroduire, dans un contexte d’évolutions profondes du travail social, les débats traditionnels
sur ses tensions internes : contrôle social et émancipation, gestion de dispositifs et innovation
sociale, assistance et autonomie, intervention sectorielle et approche territoriale, l’individuel
et le collectif (Autès, 1999 ; Ion, 2006 ; Chauviere, 2004 ; Karsz, 2004).
Depuis le début des années 1980, de nombreux travaux ont fortement nuancé les
thèses sur les fonctions du contrôle social (Esprit, 1972 ; Donzelot, 1977 ; Verdès-Leroux,
1978). Les individus concernés disposent d’une marge d’autonomie, peuvent négocier et,
surtout, refuser l’imposition d’une identité négative (Schnapper, 1989 ; Paugam, 1991 ;
Messu, 1991). Les bénéficiaires en viennent à bousculer la définition des rôles professionnels
(Corcuff, 1996 ; Dubois, 1999). Ces approches ont eu la grande vertu de réintroduire les
capacités d’initiative des acteurs. Aujourd’hui, avec la massification des situations de
vulnérabilité et leur diversité croissante, la diffusion de nouveaux modes de management et
des « épreuves de la professionnalité » (Ravon, 2010 ; Soulet, 2016), mais aussi des formes
d’engagement des intervenants sociaux (Gaspar, 2012), ces perspectives sont à la fois
prolongées, mais aussi contrebalancées par des logiques de responsabilisation de l’ensemble
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de la chaîne des acteurs, d’activation et d’exigences de reddition de comptes croissantes pour
les professionnel.le.s comme pour les personnes accompagnées.
Que « fabrique » le travail social dans la recomposition des pratiques de l’intervention,
notamment à travers les logiques d’individualisation et de contractualisation de l’aide et de
l’insertion ? De la même manière, comment penser la diffusion de la logique des innovations
sociales véhiculée aussi bien par l’État, les collectivités locales, les associations, les
fondations et les sociétés coopératives avec toute la thématique du travail social de
« partenariat » et de « territoire » ? Faut-il y voir une instrumentalisation accrue des pratiques
professionnelles par les pouvoirs publics, voire de « subversion d’un social par
l’économique », ou à l’inverse une forme de renouvellement et de décloisonnement par
« hybridation » des pratiques et des savoirs ? Ainsi, cet appel invite à réinterroger les
« fonctions » du travail social (« pourquoi le travail social ? » (Esprit, 1972)) et son « utilité »
(« à quoi sert le travail social ? » (Esprit, 1998)) jusqu’à la thématique de sa
« désinstitutionnalisation » et de sa dilution dans la notion plus large « d’intervention
sociale ».
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(MASSP) de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)