[n° ou bulletin]
Titre : |
123 - 2019/4 - « Ah, si j’étais riche ! » |
Type de document : |
texte imprimé |
Année de publication : |
2019 |
Langues : |
Français (fre) |
Résumé : |
Parler de l'immigration en Europe nous conduit généralement à évoquer les mauvaises conditions d'accueil et de vie faites aux immigré·es, la précarité des statuts juridiques subordonnés à des conditions draconiennes, le mauvais sort réservé à des populations rendues responsables de tous les maux de la société. Les lois, nombreuses, réformant l'entrée et le séjour des étrangers et le droit d'asile visent toutes à restreindre leurs "flux", à faciliter leur éloignement, à leur dénier les rares droits qui ont été préservés. Il est pourtant des étrangères et des étrangers dont la présence ne semble poser aucun problème aux autorités qui leur déroulent le tapis rouge. Quelle que soit leur nationalité, les « compétences et talents » des riches séduisent, surtout lorsqu’ils sont sonnants et trébuchants. Des dispositifs spécifiques ont donc été mis en place pour faciliter leur venue et celle de leur famille, d'abord régis par voie de circulaire jusqu'à la politique assumée d'"immigration choisie" qui n'a cessé d'être renforcée depuis 2008. Et que dire des visas et des passeports "dorés" que la plupart des États européens proposent aux très riches au risque de mettre à mal les principes d'une citoyenneté européenne commune ? Dans le domaine de l'immigration comme ailleurs, on ne prête décidément qu'aux riches... |
Note de contenu : |
"Tapis rouge pour les plus riches : Derrière son apparence ironique, le titre de ce dossier résume bien le ton que nous souhaitions donner au numéro, ces quelques mots traduisant l’existence d’un traitement favorable et assumé au profit des plus nantis sur le terrain de la politique d’immigration : aux personnes étrangères ordinaires, des titres précaires subordonnés à des conditions draconiennes avec, en amont, une politique de délivrance de visas pilotée en conséquence ; aux autres – ceux et celles qui sortent « de l’ordinaire » – des facilités pour entrer sur le sol français, y circuler et des statuts dédiés, revendiqués comme attractifs.
La réalité des situations personnelles, comme leur prise en compte par les pouvoirs publics, se révèle, de toute évidence, plus complexe et ce pour plusieurs raisons. En premier lieu, la ligne de partage entre les catégories est difficile à tracer et il n’est pas aisé de dire où l’on met le curseur pour passer de l’une à l’autre : à quel niveau de richesse change-t-on de camp ? Combien de talents faut-il emmagasiner pour être élu ? De quels talents et compétences parle-t-on ? Par ailleurs, la politique de suspicion qui gangrène le droit au séjour des étrangers déteint nécessairement, par un effet domino, sur tout le monde, y compris sur les personnes que la France voudrait mettre à l’écart pour mieux les accueillir. Enfin, les pratiques préfectorales et les mauvaises conditions d’accueil, comme celles résultant de la dématérialisation des prises de rendez-vous, s’appliquent, là encore, à toutes les personnes étrangères, même si certaines sont mieux armées pour y faire face.
Il n’en demeure pas moins que les pouvoirs publics ont progressivement déplié le tapis rouge pour encadrer l’entrée et le séjour de certaines personnes étrangères et pour construire des catégories que l’on cherche à attirer en France. C’est un peu l’histoire de ces dispositifs que le présent article se donne pour objet d’analyser." Nathalie Ferré (Université Paris13, Iris) |
En ligne : |
https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2019-4.htm |
Permalink : |
https://cs.iut.univ-tours.fr/index.php?lvl=bulletin_display&id=54493 |
[n° ou bulletin]
123 - 2019/4 - « Ah, si j’étais riche ! » [texte imprimé] . - 2019. Langues : Français ( fre)
Résumé : |
Parler de l'immigration en Europe nous conduit généralement à évoquer les mauvaises conditions d'accueil et de vie faites aux immigré·es, la précarité des statuts juridiques subordonnés à des conditions draconiennes, le mauvais sort réservé à des populations rendues responsables de tous les maux de la société. Les lois, nombreuses, réformant l'entrée et le séjour des étrangers et le droit d'asile visent toutes à restreindre leurs "flux", à faciliter leur éloignement, à leur dénier les rares droits qui ont été préservés. Il est pourtant des étrangères et des étrangers dont la présence ne semble poser aucun problème aux autorités qui leur déroulent le tapis rouge. Quelle que soit leur nationalité, les « compétences et talents » des riches séduisent, surtout lorsqu’ils sont sonnants et trébuchants. Des dispositifs spécifiques ont donc été mis en place pour faciliter leur venue et celle de leur famille, d'abord régis par voie de circulaire jusqu'à la politique assumée d'"immigration choisie" qui n'a cessé d'être renforcée depuis 2008. Et que dire des visas et des passeports "dorés" que la plupart des États européens proposent aux très riches au risque de mettre à mal les principes d'une citoyenneté européenne commune ? Dans le domaine de l'immigration comme ailleurs, on ne prête décidément qu'aux riches... |
Note de contenu : |
"Tapis rouge pour les plus riches : Derrière son apparence ironique, le titre de ce dossier résume bien le ton que nous souhaitions donner au numéro, ces quelques mots traduisant l’existence d’un traitement favorable et assumé au profit des plus nantis sur le terrain de la politique d’immigration : aux personnes étrangères ordinaires, des titres précaires subordonnés à des conditions draconiennes avec, en amont, une politique de délivrance de visas pilotée en conséquence ; aux autres – ceux et celles qui sortent « de l’ordinaire » – des facilités pour entrer sur le sol français, y circuler et des statuts dédiés, revendiqués comme attractifs.
La réalité des situations personnelles, comme leur prise en compte par les pouvoirs publics, se révèle, de toute évidence, plus complexe et ce pour plusieurs raisons. En premier lieu, la ligne de partage entre les catégories est difficile à tracer et il n’est pas aisé de dire où l’on met le curseur pour passer de l’une à l’autre : à quel niveau de richesse change-t-on de camp ? Combien de talents faut-il emmagasiner pour être élu ? De quels talents et compétences parle-t-on ? Par ailleurs, la politique de suspicion qui gangrène le droit au séjour des étrangers déteint nécessairement, par un effet domino, sur tout le monde, y compris sur les personnes que la France voudrait mettre à l’écart pour mieux les accueillir. Enfin, les pratiques préfectorales et les mauvaises conditions d’accueil, comme celles résultant de la dématérialisation des prises de rendez-vous, s’appliquent, là encore, à toutes les personnes étrangères, même si certaines sont mieux armées pour y faire face.
Il n’en demeure pas moins que les pouvoirs publics ont progressivement déplié le tapis rouge pour encadrer l’entrée et le séjour de certaines personnes étrangères et pour construire des catégories que l’on cherche à attirer en France. C’est un peu l’histoire de ces dispositifs que le présent article se donne pour objet d’analyser." Nathalie Ferré (Université Paris13, Iris) |
En ligne : |
https://www.cairn.info/revue-plein-droit-2019-4.htm |
Permalink : |
https://cs.iut.univ-tours.fr/index.php?lvl=bulletin_display&id=54493 |
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