Titre : |
"Education populaire" : les deux ou trois vies d'une formule [Thèse] |
Type de document : |
texte imprimé |
Auteurs : |
Frédéric Chateigner (1978-...) , Auteur ; Vincent Dubois (1966-...) , Directeur de la recherche ; Gérard Mauger (1943-...) , Directeur de la recherche |
Editeur : |
Strasbourg : Faculté des sciences sociales de l'Université de Strasbourg |
Année de publication : |
2008 |
Importance : |
474 p. |
Format : |
21 x 29,7 cm |
Note générale : |
Thèse de doctorat en Sciences politiques Soutenue le 13-12-2012 à Strasbourg , dans le cadre de École doctorale Droit, science politique et histoire (Strasbourg) , en partenariat avec Politique, religion, institutions et sociétés : mutations européennes (Strasbourg) (équipe de recherche). Le président du jury était Bruno Duriez. Le jury était composé de Alice Krieg-Planque. Les rapporteurs étaient Françoise Laot, Bernard Pudal. |
Langues : |
Français (fre) |
Catégories : |
J CULTURE - ART - LOISIRS - ANIMATION
|
Mots-clés : |
Éducation populaire Analyse du discours Formule Catégorie Politiques culturelles Animation socioculturelle Éducation des adultes Éducation populaire -- France -- Histoire -- Thèses et écrits académiques Jeunesse -- Activité politique -- Éducation des adultes -- Politique publique -- Politique culturelle -- Langage politique Temps Modernes Françoise Tétard histoire sociale |
Index. décimale : |
J-50 Loisirs - Animation - Education populaire |
Résumé : |
L'expression « éducation populaire » connaît en France une nouvelle fortune depuis les années 1990. La recherche vise à éclaircir le sens et les causes de ce retour en grâce discursif. On définit la séquence « éducation populaire » comme une formule, au sens de l'analyse du discours, en lien avec la notion de catégorie. L'étude du retour contemporain de celle-ci impose un long détour par son histoire. Celle-ci se décompose en deux cycles complet constitués de phases d'émergence, de consécration et de déclin autour d'un usage de la formule comme quasi-catégorie : sous-catégorie de l'Instruction publique entre la Révolution française et les années 1930, puis catégorie détachée de l'École mais associée à des formules concurrentes et bientôt reléguées par elles au rang d'ancêtre mythique. La période contemporaine se présente comme l'émergence d’un usage détaché de l’animation socioculturelle et orientée vers la formation militante et la repolitisation des politiques culturelles ; ce nouvel usage, qui demeure toutefois en concurrence avec une remobilisation du secteur Jeunesse et Éducation populaire, réintroduit en outre les pratiques d’origine scolaires que ce dernier avait écartées. |
Note de contenu : |
Voir aussi en hyperlien : "Une troisième vie de l’éducation populaire ? Les relances des années 1990-2000" / Carnet de recherches du Comité d'histoire du ministère de la Culture sur les politiques, les institutions et les pratiques culturelles à l'occasion du séminiaire sur le 60e anniversaire du ministère : Le présent texte n’est pas exactement celui présenté au séminaire « La démocratisation culturelle au fil de l’histoire contemporaine » du Comité d’histoire du ministère de la Culture (Science Po, le 10 février 2014) mais son contenu en est très proche. Il s’agit en réalité de la version rédigée (en vue d’une publication des actes, à paraître) d’une communication présentée sous un autre titre au colloque « L’éducation populaire au tournant du XXIe siècle » organisé à l’Université Paris-Est Créteil du 16 au 18 novembre 2011. Le texte date de décembre 2013, quelques éléments factuels devraient être modifiées. Cette pré-publication a lieu, bien entendu, avec l’aimable autorisation des coordinateurs du colloque, Francis Lebon et Emmanuel de Lescure. Toute cette analyse, enfin, est développée dans le dernier chapitre d’une thèse à paraître aux Presses universitaires de Rennes, collection « Res Publica ».
Résumé : Cet article propose un aperçu du retour dans les discours publics de l’expression « éducation populaire » depuis les années 1990. Fondé sur un large corpus de discours publics consacrés à l’éducation populaire et les trajectoires des auteurs, il met en évidence le poids du calendrier politique sur la promotion de cette catégorie. L’article identifie ainsi trois périodes rythmées par celui-ci : du milieu des années 1990 au début des années 2000, développement d’expériences pionnières puis échec de celles qui promettaient de déboucher sur des politiques publiques ; jusqu’en 2007 environ, tentatives individuelles ou collectives de relais militants et plein essor des usages de l’« éducation populaire » dans les mouvements sociaux ; depuis lors, éclatement entre diverses mobilisations que distinguent leur rapport au champ politique et leur définition plus ou moins oecuménique de l’éducation populaire.
Dans une notice bio-bibliographique rédigée après la disparition de l’historienne Françoise Tétard, Jean-Claude Richez rappelait le double postulat sur lequel reposait la manière qu’avait celle-ci d’aborder l’histoire de l’éducation populaire : « (1) relèvent de l’éducation populaire les personnes et les mouvements qui s’en réclament, (2) pour comprendre l’histoire d’un mouvement et le construire, on ne peut prendre comme point de départ que sa matérialisation dans des institutions ou dans une approche prosopographique1 ». Du fait de cette double exigence nominaliste (refus de se limiter à des critères essentialistes ou à des listes de cooptation) et monographique, « une histoire générale de l’éducation populaire lui semblait impossible » intrinsèquement et non pas seulement « de par le faible nombre de travaux scientifiques ». La démarche de ma recherche reprend le premier de ces principes (le caractère primordial de la prétention à faire de l’éducation populaire) mais écarte en partie le second : il y a bien un niveau auquel une histoire générale de l’éducation populaire est – dès maintenant – possible, celui des usages publics de l’expression elle-même2. Comment ceux-ci émergent-ils et évoluent-ils ? Dans quels contextes ? En lien ou en concurrence avec quelles autres formulations ? Une telle histoire ne suppose d’ailleurs pas de renoncer totalement aux monographies institutionnelles et à l’approche prosopographique : simplement, les premières doivent être limitées aux institutions les plus activement nominalistes, celles qui font de la promotion de la formule « éducation populaire » elle-même un de leurs objets ; et l’approche prosopographique doit concerner les principaux producteurs de discours publics sur l’éducation populaire. Cette socio-histoire de la formule « éducation populaire » comprend un volet « historique », ou disons plutôt « ancien », allant des premières occurrences prérévolutionnaires jusqu’au milieu des années 1990 et une partie « sociologique » – ou plutôt « immédiate » ou « récente» – qui s’attache aux quinze années suivantes. L’ensemble de la recherche repose sur un vaste corpus de documents comprenant la formule « éducation populaire » (ou des variantes historiquement changeantes) dans leur paratexte, enrichi pour la période récente d’enquêtes par observation, entretiens et reconstitutions biographiques.
C’est évidemment de cette deuxième partie qu’est tirée la présente contribution. On s’arrêtera en effet au retour dans les discours publics de l’« éducation populaire » au tournant de ce siècle, du milieu des années 1990 à aujourd’hui. « L’éducation populaire est de retour » : constat omniprésent, mais qui suscite moins d’analyses que d’énumérations enthousiastes. À quel rythme, ce retour ? Selon quelle logique générale ? Peut-on échapper, pour en rendre compte, à l’effet catalogue ? On proposera donc une schématisation qui est aussi une périodisation. Au coeur de ce schéma se trouve le calendrier spécifique du champ politique, au sens strict d’espace social principalement régi par la compétition électorale, dont on montrera qu’il donne assez directement le tempo aux promotions récentes de l’éducation populaire.
Cette histoire se décompose en trois temps :
– Le premier, du milieu des années 1990 au début des années 2000, consiste en des relances « pionnières », au sens où elles prennent forme alors que le retour de la catégorie n’est pas déjà largement diagnostiqué. Ces relances supposent l’existence en amont de conservatoires, mais aussi d’opportunités directement liées au champ politique. C’est encore le rythme électoral qui marque la fin des expériences directement liées aux politiques publiques.
– Une seconde période se caractérise à la fois par le retrait des tentatives de politiques publiques et par l’intensification de l’offre dans un mouvement social dont une relative unification paraît possible (c’est la période de plein essor de l’Association pour la taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens, ATTAC3). Cette période est féconde en discours de toute sorte, collectifs et individuels. Elle prend fin vers 2007 pour des raisons internes mais aussi et surtout, là encore, d’échéances électorales et plus généralement de rapports au champ politique.
– La troisième période, en cours, voit un éclatement de la référence en fonction de deux critères : le rapport au champ politique et le caractère plus ou moins oecuménique de la définition de l’éducation populaire.
1. Les relances pionnières (1995-2002)
Entre 1996 et 1998 apparaissent trois entreprises qui, au nom de l’éducation populaire, engagent des ressources relativement importantes et obtiennent une visibilité certaine : le programme « éducation populaire » mis en place par la ville de Strasbourg à partir du deuxième mandat de maire de Catherine Trautmann (1995), les rencontres de la Sorbonne puis l’Offre publique de réflexion (OPR) sur l’éducation populaire organisées par le ministère de la Jeunesse et des Sports (MJS) de Marie-George Buffet (1998-2001) et la fondation d’ATTAC comme « mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action » (1998). Comprendre ces trois relances implique un bref aperçu de l’état des discours publics sur l’éducation populaire dans les années précédentes (1.1.) ; on montrera ensuite l’importance en amont de « conservatoires » où a pu se maintenir, activement ou virtuellement, un discours sur l’éducation populaire (1.2) ; ces conservatoires n’ont cependant eu d’effet que dans le cadre de « coups » directement liés à l’état du champ politique (1.3.) ; et c’est encore le calendrier du champ politique qui explique pour une large part l’interruption précoce de deux de ces expériences (1.4).
1.1. Auparavant : silence, faire-parts et soubresautsLe retour du milieu des années 1990 ne tranche évidemment pas sur un silence absolu. Mais on a montré ailleurs, en ce qui concerne la presse quotidienne nationale, que ce moment représentait bien un tournant quantitatif (nombre d’occurrences de l’expression « éducation populaire ») et surtout qualitatif (occurrences moins figées, plus à même de désigner la catégorie à nouveaux frais et non seulement, de façon routinière, les institutions d’éducation populaire)4. Ce qui est vrai de la presse quotidienne l’est aussi de discours publics plus confidentiels et spécialisés, circulant dans les espaces militants et professionnels de l’éducation populaire. Depuis les années 1980 et au début des années 1990, les principaux discours publics sur l’éducation populaire se répartissent en deux catégories :
– D’une part, des travaux mémoriels et/ou historiques, principalement menés à l’IN(J)EP autour de Geneviève Poujol et des Cahiers de l’animation5, à quoi s’ajoutent notamment les ouvrages d’A. Léon et de J. Baldizzone6 : ceux-ci font bien exister l’« éducation populaire » dans les discours publics, mais au passé – c’est-à-dire non seulement d’un point de vue historique, mais encore comme quelque chose d’achevé et dépassé. La journée d’étude sur « l’éducation populaire au tournant des années 1970 » a lieu en 1994 et il est explicitement annoncé lors de la parution des actes en 2000 qu’il n’y aura pas de suite. En 1996 enfin paraît le dictionnaire biographique dirigé par G. Poujol et M. Romer7.
– D’autre part, des contributions collectives émanant des grandes fédérations (directement ou via le CNAJEP et le FONJEP) paraissent viser notamment à défendre leur crédit auprès de l’Etat8. La défense de l’actualité de l’éducation populaire prend d’ailleurs une forme très prudente : « nostalgie ou réalité », la question posée par le CNAJEP en 1992, certes rhétorique, prend acte du scepticisme ou de l’ignorance complète que s’attire la catégorie en-dehors d’un cercle associatif assez restreint, même si en l’occurrence Roger Bambuck manifeste, comme en d’autres occasions, un intérêt devenu rare chez les ministres de la Jeunesse et des Sports.
1.2. Trois conservatoires
Au milieu des années 1990, donc, trois initiatives majeures s’immiscent dans ce tableau discursif partagé entre mémorialisation nostalgique et affirmation incertaine d’une actualité : le programme strasbourgeois, ATTAC et l’opération du MJS. Aucune de ces opérations n’est évidemment une pure initiative d’acteurs du champ politique ou du mouvement social : elles n’auraient pu avoir lieu si la référence à l’éducation populaire n’avait pas été entretenue dans ce que la sociologue Verta Taylor a appelé des abeyance structures9. Ces « structures de mise en veille », que j’appellerai ici conservatoires, visent à maintenir des causes et mobilisations autrefois actives dans des contextes devenus peu réceptifs, en attendant des jours plus favorables. Ils ont pris des formes variées :
– Dans le cas du MJS, il s’agit de segments du secteur jeunesse-éducation populaire à la fois traditionnellement très attachés à la catégorie d’éducation populaire et encore en mesure de consacrer quelques ressources à l’entretien de celle-ci : en l’occurrence la Fédération française des maisons des jeunes et de la culture (FFMJC) et des acteurs au sein du MJS. Mais même dans ces lieux historiquement centraux du secteur, les gardiens de la flamme sont relativement marginaux. Sans doute la figure du « marginal sécant » est un peu trop volontiers utilisée par les agents eux-mêmes pour se décrire, mais cette complaisance elle-même atteste l’attachement à ce multipositionnement marginal. Celui-ci s’avère homologue de la catégorie d’éducation populaire elle-même, victime de l’éclatement entre catégories mieux institutionnalisées.
– Dans le cas de Strasbourg, c’est la région dans son ensemble qui peut passer pour un conservatoire, quoique de façon paradoxale. L’Alsace est en effet en partie étrangère à l’histoire de l’éducation populaire française. La marginalisation de la question laïque en terre concordataire se traduit par la faiblesse de la Ligue de l’enseignement (LDE) et des organisations laïques traditionnelles, lesquelles auraient pu réclamer la propriété historique de la catégorie d’éducation populaire ; le fait de n’avoir pas vécu l’épisode des universités populaires (UP) d’avant-guerre et la présence de l’exemple des Volkshochschulen allemandes et suisses rend possible l’existence active après-guerre de formules aussi marginales ailleurs que les UP. Ni étendard ni repoussoir, ou du moins sensiblement moins qu’en « France de l’intérieur », l’éducation populaire est ici protégée par sa neutralisation et non par son maintien souterrain.
– Troisième mode de conservation, un média, Le Monde diplomatique, représenté par son directeur Bernard Cassen. De 1973 à 1990 Claude Julien a fait du « Diplo » une référence de la résistance au néolibéralisme, en particulier dans le contexte des années 1980 où le mouvement social semble dépourvu de perspective face au glissement à droite de l’univers socialiste, à l’effondrement communiste et à la quasi-disparition des utopies gauchistes. C’est sous la direction de Cassen, qui succède à Claude Julien jusqu’en 2008, que le mensuel se trouve au coeur de l’initiative de la création d’ATTAC et c’est Cassen lui-même, premier président de l’association, qui propose de la désigner comme « mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action ». Cassen est un universitaire, cofondateur de l’université de Vincennes qui sera parfois qualifiée d’« université populaire » ; et Julien, dont il a rejoint l’équipe dès 1973, a fondé les Cercles Condorcet et présidé la LDE (1990-1998). Ces affinités avec les segments de l’éducation populaire les plus intellectuels et les plus en prise avec les débats politiques généraux semblent remobilisées par Cassen lorsqu’il propose « l’éducation populaire » pour qualifier, de façon opportunément vague et inclusive, ATTAC. Ce choix est du reste préfiguré, à court terme, par un article de juin 1997 du Monde Diplomatique, où Cassen diagnostique la « nécessaire refondation de l’éducation populaire » : une nécessité dont auraient bien conscience, malgré les difficultés de la tâche, les dirigeants des grandes fédérations, à commencer par Jean-Marc Roirant (LDE), qui cite même le philosophe et militant belge Luc Carton, l’inspirateur de la future OPR10. Cette conscience d’une nécessaire refondation, interrogeant les relations avec l’Etat, a il est vrai lieu après quatre ans de gouvernement de droite. L’article est publié alors que le changement de majorité est connu et s’achève sur l’idée que les dirigeants des associations de l’éducation populaire vont devoir « plaider leur cause auprès du gouvernement… » Points de suspension évocateurs, dont on se demande ce qu’ils laissent dans le flou : la réceptivité du gouvernement Jospin ou la combativité des associations ? Conçu dans un esprit où l’affrontement avec un pouvoir hostile semblait inévitable pour au moins un an encore, l’article paraît donc quand les dirigeants associatifs peuvent espérer, sinon le retour aux beaux jours cogestionnaires, du moins à un peu plus de compréhension, et donc de leur part, plus de modération.
1.3 Trois opportunités politiques
Mais ces conservatoires seraient restés sans effet si n’avaient existé des opportunités de relancer plus largement la catégorie d’éducation populaire en-dehors – opportunités qui dépendent, dans ces trois cas, du champ politique, en son cœur ou en ses marges.
Les deux premiers cas se ressemblent. Une femme politique (Catherine Trautmann, Marie-George Buffet), réélue ou nommée à la tête d’une administration importante (ville de Strasbourg, MJS) propose ou se voit proposer un programme d’éducation populaire directement animé par la collectivité locale ou l’État. Pour Buffet, l’enjeu est d’exister comme titulaire communiste d’un portefeuille mineur au sein d’une coalition menée par les socialistes ; la conception intersectorielle, d’aspect iconoclaste sans être trop spécifiée (grâce au thème de la délibération démocratique) promue par Luc Carton puis par Franck Lepage est un moyen d’éviter d’être cantonnée aux sports : si sa politique sportive (lutte contre le dopage, financement du sport amateur…) parle aux médias et au plus grand nombre, comme dans une certaine mesure le Conseil national de la jeunesse, le débat sur l’éducation populaire positionne le MJS comme une tribune envers les soutiens habituels des alliés-concurrents de la gauche plurielle. Quant à Trautmann, malgré sa réélection au 1er tour, sa situation n’est pas aussi favorable qu’il n’y paraît : les progrès du FN et de ses thématiques sécuritaires et la persistance d’un vote majoritairement à droite pour les présidentielles à Strasbourg compromettent la possibilité de mobiliser l’électorat des quartiers périphériques populaires : il est plus facile de contenter les classes moyennes du centre-ville, mais il faut dans le même temps satisfaire les réseaux associatifs agissant dans les quartiers populaires. L’« éducation populaire » est une catégorie suffisamment peu marquée, en Alsace du moins, pour, selon Virginie Anquetin, tenir un discours « médian » :
« équidistant de celui tenu par les soutiens socioculturels “de gauche” de la municipalité, qui tendent à déplorer une trop faible ou inadéquate prise en charge des habitants des “quartier populaires” (…) et d’un marquage “social” que certains des adjoints municipaux, sensibles à ne pas donner de nouvelles prises critiques à l’opposition, tels Jean-Claude Petitdemange [futur candidat dissident à la municipale de 2001], considèrent comme risquant de remobiliser “la droite”. Contribuer à “l’éducation des jeunes” est en outre conçu comme une thématique qui permet de valoriser l’intervention municipale, au service de la résolution de ce “problème”, et de favoriser un cadrage de presse plus positif que les énoncés rituels déplorant la difficulté de la vie des habitants des “zones sensibles” ». |
En ligne : |
https://chmcc.hypotheses.org/1238#sdfootnote10sym |
Permalink : |
https://cs.iut.univ-tours.fr/index.php?lvl=notice_display&id=154577 |
"Education populaire" : les deux ou trois vies d'une formule [Thèse] [texte imprimé] / Frédéric Chateigner (1978-...)  , Auteur ; Vincent Dubois (1966-...)  , Directeur de la recherche ; Gérard Mauger (1943-...)  , Directeur de la recherche . - Strasbourg : Faculté des sciences sociales de l'Université de Strasbourg, 2008 . - 474 p. ; 21 x 29,7 cm. Thèse de doctorat en Sciences politiques Soutenue le 13-12-2012 à Strasbourg , dans le cadre de École doctorale Droit, science politique et histoire (Strasbourg) , en partenariat avec Politique, religion, institutions et sociétés : mutations européennes (Strasbourg) (équipe de recherche). Le président du jury était Bruno Duriez. Le jury était composé de Alice Krieg-Planque. Les rapporteurs étaient Françoise Laot, Bernard Pudal. Langues : Français ( fre)
Catégories : |
J CULTURE - ART - LOISIRS - ANIMATION
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Mots-clés : |
Éducation populaire Analyse du discours Formule Catégorie Politiques culturelles Animation socioculturelle Éducation des adultes Éducation populaire -- France -- Histoire -- Thèses et écrits académiques Jeunesse -- Activité politique -- Éducation des adultes -- Politique publique -- Politique culturelle -- Langage politique Temps Modernes Françoise Tétard histoire sociale |
Index. décimale : |
J-50 Loisirs - Animation - Education populaire |
Résumé : |
L'expression « éducation populaire » connaît en France une nouvelle fortune depuis les années 1990. La recherche vise à éclaircir le sens et les causes de ce retour en grâce discursif. On définit la séquence « éducation populaire » comme une formule, au sens de l'analyse du discours, en lien avec la notion de catégorie. L'étude du retour contemporain de celle-ci impose un long détour par son histoire. Celle-ci se décompose en deux cycles complet constitués de phases d'émergence, de consécration et de déclin autour d'un usage de la formule comme quasi-catégorie : sous-catégorie de l'Instruction publique entre la Révolution française et les années 1930, puis catégorie détachée de l'École mais associée à des formules concurrentes et bientôt reléguées par elles au rang d'ancêtre mythique. La période contemporaine se présente comme l'émergence d’un usage détaché de l’animation socioculturelle et orientée vers la formation militante et la repolitisation des politiques culturelles ; ce nouvel usage, qui demeure toutefois en concurrence avec une remobilisation du secteur Jeunesse et Éducation populaire, réintroduit en outre les pratiques d’origine scolaires que ce dernier avait écartées. |
Note de contenu : |
Voir aussi en hyperlien : "Une troisième vie de l’éducation populaire ? Les relances des années 1990-2000" / Carnet de recherches du Comité d'histoire du ministère de la Culture sur les politiques, les institutions et les pratiques culturelles à l'occasion du séminiaire sur le 60e anniversaire du ministère : Le présent texte n’est pas exactement celui présenté au séminaire « La démocratisation culturelle au fil de l’histoire contemporaine » du Comité d’histoire du ministère de la Culture (Science Po, le 10 février 2014) mais son contenu en est très proche. Il s’agit en réalité de la version rédigée (en vue d’une publication des actes, à paraître) d’une communication présentée sous un autre titre au colloque « L’éducation populaire au tournant du XXIe siècle » organisé à l’Université Paris-Est Créteil du 16 au 18 novembre 2011. Le texte date de décembre 2013, quelques éléments factuels devraient être modifiées. Cette pré-publication a lieu, bien entendu, avec l’aimable autorisation des coordinateurs du colloque, Francis Lebon et Emmanuel de Lescure. Toute cette analyse, enfin, est développée dans le dernier chapitre d’une thèse à paraître aux Presses universitaires de Rennes, collection « Res Publica ».
Résumé : Cet article propose un aperçu du retour dans les discours publics de l’expression « éducation populaire » depuis les années 1990. Fondé sur un large corpus de discours publics consacrés à l’éducation populaire et les trajectoires des auteurs, il met en évidence le poids du calendrier politique sur la promotion de cette catégorie. L’article identifie ainsi trois périodes rythmées par celui-ci : du milieu des années 1990 au début des années 2000, développement d’expériences pionnières puis échec de celles qui promettaient de déboucher sur des politiques publiques ; jusqu’en 2007 environ, tentatives individuelles ou collectives de relais militants et plein essor des usages de l’« éducation populaire » dans les mouvements sociaux ; depuis lors, éclatement entre diverses mobilisations que distinguent leur rapport au champ politique et leur définition plus ou moins oecuménique de l’éducation populaire.
Dans une notice bio-bibliographique rédigée après la disparition de l’historienne Françoise Tétard, Jean-Claude Richez rappelait le double postulat sur lequel reposait la manière qu’avait celle-ci d’aborder l’histoire de l’éducation populaire : « (1) relèvent de l’éducation populaire les personnes et les mouvements qui s’en réclament, (2) pour comprendre l’histoire d’un mouvement et le construire, on ne peut prendre comme point de départ que sa matérialisation dans des institutions ou dans une approche prosopographique1 ». Du fait de cette double exigence nominaliste (refus de se limiter à des critères essentialistes ou à des listes de cooptation) et monographique, « une histoire générale de l’éducation populaire lui semblait impossible » intrinsèquement et non pas seulement « de par le faible nombre de travaux scientifiques ». La démarche de ma recherche reprend le premier de ces principes (le caractère primordial de la prétention à faire de l’éducation populaire) mais écarte en partie le second : il y a bien un niveau auquel une histoire générale de l’éducation populaire est – dès maintenant – possible, celui des usages publics de l’expression elle-même2. Comment ceux-ci émergent-ils et évoluent-ils ? Dans quels contextes ? En lien ou en concurrence avec quelles autres formulations ? Une telle histoire ne suppose d’ailleurs pas de renoncer totalement aux monographies institutionnelles et à l’approche prosopographique : simplement, les premières doivent être limitées aux institutions les plus activement nominalistes, celles qui font de la promotion de la formule « éducation populaire » elle-même un de leurs objets ; et l’approche prosopographique doit concerner les principaux producteurs de discours publics sur l’éducation populaire. Cette socio-histoire de la formule « éducation populaire » comprend un volet « historique », ou disons plutôt « ancien », allant des premières occurrences prérévolutionnaires jusqu’au milieu des années 1990 et une partie « sociologique » – ou plutôt « immédiate » ou « récente» – qui s’attache aux quinze années suivantes. L’ensemble de la recherche repose sur un vaste corpus de documents comprenant la formule « éducation populaire » (ou des variantes historiquement changeantes) dans leur paratexte, enrichi pour la période récente d’enquêtes par observation, entretiens et reconstitutions biographiques.
C’est évidemment de cette deuxième partie qu’est tirée la présente contribution. On s’arrêtera en effet au retour dans les discours publics de l’« éducation populaire » au tournant de ce siècle, du milieu des années 1990 à aujourd’hui. « L’éducation populaire est de retour » : constat omniprésent, mais qui suscite moins d’analyses que d’énumérations enthousiastes. À quel rythme, ce retour ? Selon quelle logique générale ? Peut-on échapper, pour en rendre compte, à l’effet catalogue ? On proposera donc une schématisation qui est aussi une périodisation. Au coeur de ce schéma se trouve le calendrier spécifique du champ politique, au sens strict d’espace social principalement régi par la compétition électorale, dont on montrera qu’il donne assez directement le tempo aux promotions récentes de l’éducation populaire.
Cette histoire se décompose en trois temps :
– Le premier, du milieu des années 1990 au début des années 2000, consiste en des relances « pionnières », au sens où elles prennent forme alors que le retour de la catégorie n’est pas déjà largement diagnostiqué. Ces relances supposent l’existence en amont de conservatoires, mais aussi d’opportunités directement liées au champ politique. C’est encore le rythme électoral qui marque la fin des expériences directement liées aux politiques publiques.
– Une seconde période se caractérise à la fois par le retrait des tentatives de politiques publiques et par l’intensification de l’offre dans un mouvement social dont une relative unification paraît possible (c’est la période de plein essor de l’Association pour la taxation des transactions financières pour l’aide aux citoyens, ATTAC3). Cette période est féconde en discours de toute sorte, collectifs et individuels. Elle prend fin vers 2007 pour des raisons internes mais aussi et surtout, là encore, d’échéances électorales et plus généralement de rapports au champ politique.
– La troisième période, en cours, voit un éclatement de la référence en fonction de deux critères : le rapport au champ politique et le caractère plus ou moins oecuménique de la définition de l’éducation populaire.
1. Les relances pionnières (1995-2002)
Entre 1996 et 1998 apparaissent trois entreprises qui, au nom de l’éducation populaire, engagent des ressources relativement importantes et obtiennent une visibilité certaine : le programme « éducation populaire » mis en place par la ville de Strasbourg à partir du deuxième mandat de maire de Catherine Trautmann (1995), les rencontres de la Sorbonne puis l’Offre publique de réflexion (OPR) sur l’éducation populaire organisées par le ministère de la Jeunesse et des Sports (MJS) de Marie-George Buffet (1998-2001) et la fondation d’ATTAC comme « mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action » (1998). Comprendre ces trois relances implique un bref aperçu de l’état des discours publics sur l’éducation populaire dans les années précédentes (1.1.) ; on montrera ensuite l’importance en amont de « conservatoires » où a pu se maintenir, activement ou virtuellement, un discours sur l’éducation populaire (1.2) ; ces conservatoires n’ont cependant eu d’effet que dans le cadre de « coups » directement liés à l’état du champ politique (1.3.) ; et c’est encore le calendrier du champ politique qui explique pour une large part l’interruption précoce de deux de ces expériences (1.4).
1.1. Auparavant : silence, faire-parts et soubresautsLe retour du milieu des années 1990 ne tranche évidemment pas sur un silence absolu. Mais on a montré ailleurs, en ce qui concerne la presse quotidienne nationale, que ce moment représentait bien un tournant quantitatif (nombre d’occurrences de l’expression « éducation populaire ») et surtout qualitatif (occurrences moins figées, plus à même de désigner la catégorie à nouveaux frais et non seulement, de façon routinière, les institutions d’éducation populaire)4. Ce qui est vrai de la presse quotidienne l’est aussi de discours publics plus confidentiels et spécialisés, circulant dans les espaces militants et professionnels de l’éducation populaire. Depuis les années 1980 et au début des années 1990, les principaux discours publics sur l’éducation populaire se répartissent en deux catégories :
– D’une part, des travaux mémoriels et/ou historiques, principalement menés à l’IN(J)EP autour de Geneviève Poujol et des Cahiers de l’animation5, à quoi s’ajoutent notamment les ouvrages d’A. Léon et de J. Baldizzone6 : ceux-ci font bien exister l’« éducation populaire » dans les discours publics, mais au passé – c’est-à-dire non seulement d’un point de vue historique, mais encore comme quelque chose d’achevé et dépassé. La journée d’étude sur « l’éducation populaire au tournant des années 1970 » a lieu en 1994 et il est explicitement annoncé lors de la parution des actes en 2000 qu’il n’y aura pas de suite. En 1996 enfin paraît le dictionnaire biographique dirigé par G. Poujol et M. Romer7.
– D’autre part, des contributions collectives émanant des grandes fédérations (directement ou via le CNAJEP et le FONJEP) paraissent viser notamment à défendre leur crédit auprès de l’Etat8. La défense de l’actualité de l’éducation populaire prend d’ailleurs une forme très prudente : « nostalgie ou réalité », la question posée par le CNAJEP en 1992, certes rhétorique, prend acte du scepticisme ou de l’ignorance complète que s’attire la catégorie en-dehors d’un cercle associatif assez restreint, même si en l’occurrence Roger Bambuck manifeste, comme en d’autres occasions, un intérêt devenu rare chez les ministres de la Jeunesse et des Sports.
1.2. Trois conservatoires
Au milieu des années 1990, donc, trois initiatives majeures s’immiscent dans ce tableau discursif partagé entre mémorialisation nostalgique et affirmation incertaine d’une actualité : le programme strasbourgeois, ATTAC et l’opération du MJS. Aucune de ces opérations n’est évidemment une pure initiative d’acteurs du champ politique ou du mouvement social : elles n’auraient pu avoir lieu si la référence à l’éducation populaire n’avait pas été entretenue dans ce que la sociologue Verta Taylor a appelé des abeyance structures9. Ces « structures de mise en veille », que j’appellerai ici conservatoires, visent à maintenir des causes et mobilisations autrefois actives dans des contextes devenus peu réceptifs, en attendant des jours plus favorables. Ils ont pris des formes variées :
– Dans le cas du MJS, il s’agit de segments du secteur jeunesse-éducation populaire à la fois traditionnellement très attachés à la catégorie d’éducation populaire et encore en mesure de consacrer quelques ressources à l’entretien de celle-ci : en l’occurrence la Fédération française des maisons des jeunes et de la culture (FFMJC) et des acteurs au sein du MJS. Mais même dans ces lieux historiquement centraux du secteur, les gardiens de la flamme sont relativement marginaux. Sans doute la figure du « marginal sécant » est un peu trop volontiers utilisée par les agents eux-mêmes pour se décrire, mais cette complaisance elle-même atteste l’attachement à ce multipositionnement marginal. Celui-ci s’avère homologue de la catégorie d’éducation populaire elle-même, victime de l’éclatement entre catégories mieux institutionnalisées.
– Dans le cas de Strasbourg, c’est la région dans son ensemble qui peut passer pour un conservatoire, quoique de façon paradoxale. L’Alsace est en effet en partie étrangère à l’histoire de l’éducation populaire française. La marginalisation de la question laïque en terre concordataire se traduit par la faiblesse de la Ligue de l’enseignement (LDE) et des organisations laïques traditionnelles, lesquelles auraient pu réclamer la propriété historique de la catégorie d’éducation populaire ; le fait de n’avoir pas vécu l’épisode des universités populaires (UP) d’avant-guerre et la présence de l’exemple des Volkshochschulen allemandes et suisses rend possible l’existence active après-guerre de formules aussi marginales ailleurs que les UP. Ni étendard ni repoussoir, ou du moins sensiblement moins qu’en « France de l’intérieur », l’éducation populaire est ici protégée par sa neutralisation et non par son maintien souterrain.
– Troisième mode de conservation, un média, Le Monde diplomatique, représenté par son directeur Bernard Cassen. De 1973 à 1990 Claude Julien a fait du « Diplo » une référence de la résistance au néolibéralisme, en particulier dans le contexte des années 1980 où le mouvement social semble dépourvu de perspective face au glissement à droite de l’univers socialiste, à l’effondrement communiste et à la quasi-disparition des utopies gauchistes. C’est sous la direction de Cassen, qui succède à Claude Julien jusqu’en 2008, que le mensuel se trouve au coeur de l’initiative de la création d’ATTAC et c’est Cassen lui-même, premier président de l’association, qui propose de la désigner comme « mouvement d’éducation populaire tourné vers l’action ». Cassen est un universitaire, cofondateur de l’université de Vincennes qui sera parfois qualifiée d’« université populaire » ; et Julien, dont il a rejoint l’équipe dès 1973, a fondé les Cercles Condorcet et présidé la LDE (1990-1998). Ces affinités avec les segments de l’éducation populaire les plus intellectuels et les plus en prise avec les débats politiques généraux semblent remobilisées par Cassen lorsqu’il propose « l’éducation populaire » pour qualifier, de façon opportunément vague et inclusive, ATTAC. Ce choix est du reste préfiguré, à court terme, par un article de juin 1997 du Monde Diplomatique, où Cassen diagnostique la « nécessaire refondation de l’éducation populaire » : une nécessité dont auraient bien conscience, malgré les difficultés de la tâche, les dirigeants des grandes fédérations, à commencer par Jean-Marc Roirant (LDE), qui cite même le philosophe et militant belge Luc Carton, l’inspirateur de la future OPR10. Cette conscience d’une nécessaire refondation, interrogeant les relations avec l’Etat, a il est vrai lieu après quatre ans de gouvernement de droite. L’article est publié alors que le changement de majorité est connu et s’achève sur l’idée que les dirigeants des associations de l’éducation populaire vont devoir « plaider leur cause auprès du gouvernement… » Points de suspension évocateurs, dont on se demande ce qu’ils laissent dans le flou : la réceptivité du gouvernement Jospin ou la combativité des associations ? Conçu dans un esprit où l’affrontement avec un pouvoir hostile semblait inévitable pour au moins un an encore, l’article paraît donc quand les dirigeants associatifs peuvent espérer, sinon le retour aux beaux jours cogestionnaires, du moins à un peu plus de compréhension, et donc de leur part, plus de modération.
1.3 Trois opportunités politiques
Mais ces conservatoires seraient restés sans effet si n’avaient existé des opportunités de relancer plus largement la catégorie d’éducation populaire en-dehors – opportunités qui dépendent, dans ces trois cas, du champ politique, en son cœur ou en ses marges.
Les deux premiers cas se ressemblent. Une femme politique (Catherine Trautmann, Marie-George Buffet), réélue ou nommée à la tête d’une administration importante (ville de Strasbourg, MJS) propose ou se voit proposer un programme d’éducation populaire directement animé par la collectivité locale ou l’État. Pour Buffet, l’enjeu est d’exister comme titulaire communiste d’un portefeuille mineur au sein d’une coalition menée par les socialistes ; la conception intersectorielle, d’aspect iconoclaste sans être trop spécifiée (grâce au thème de la délibération démocratique) promue par Luc Carton puis par Franck Lepage est un moyen d’éviter d’être cantonnée aux sports : si sa politique sportive (lutte contre le dopage, financement du sport amateur…) parle aux médias et au plus grand nombre, comme dans une certaine mesure le Conseil national de la jeunesse, le débat sur l’éducation populaire positionne le MJS comme une tribune envers les soutiens habituels des alliés-concurrents de la gauche plurielle. Quant à Trautmann, malgré sa réélection au 1er tour, sa situation n’est pas aussi favorable qu’il n’y paraît : les progrès du FN et de ses thématiques sécuritaires et la persistance d’un vote majoritairement à droite pour les présidentielles à Strasbourg compromettent la possibilité de mobiliser l’électorat des quartiers périphériques populaires : il est plus facile de contenter les classes moyennes du centre-ville, mais il faut dans le même temps satisfaire les réseaux associatifs agissant dans les quartiers populaires. L’« éducation populaire » est une catégorie suffisamment peu marquée, en Alsace du moins, pour, selon Virginie Anquetin, tenir un discours « médian » :
« équidistant de celui tenu par les soutiens socioculturels “de gauche” de la municipalité, qui tendent à déplorer une trop faible ou inadéquate prise en charge des habitants des “quartier populaires” (…) et d’un marquage “social” que certains des adjoints municipaux, sensibles à ne pas donner de nouvelles prises critiques à l’opposition, tels Jean-Claude Petitdemange [futur candidat dissident à la municipale de 2001], considèrent comme risquant de remobiliser “la droite”. Contribuer à “l’éducation des jeunes” est en outre conçu comme une thématique qui permet de valoriser l’intervention municipale, au service de la résolution de ce “problème”, et de favoriser un cadrage de presse plus positif que les énoncés rituels déplorant la difficulté de la vie des habitants des “zones sensibles” ». |
En ligne : |
https://chmcc.hypotheses.org/1238#sdfootnote10sym |
Permalink : |
https://cs.iut.univ-tours.fr/index.php?lvl=notice_display&id=154577 |
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